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La Sarkolique
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15 mars 2010

Le sarkozysme chronique, une addiction inquiétante

J’ai appris une bien mauvaise nouvelle. Mon copain Gérard, dont vous avez pu apprécier pourtant la finesse de certaines analyses, est atteint de sarkozysme chronique !

Cette découverte m’a profondément secoué, vous devez bien l’imaginer. Ayant lu quelques articles sur le sujet, je sais que le sarkozysme chronique et plus répandu qu’on ne le croit habituellement. Certaines études affirment que 15 % de la population adulte de notre pays est touchée.

Le sarko, puissante drogue médiatique et principal vecteur du sarkozysme chronique, est aux mains d’un groupe de professionnels dont quelques noms sont connus de tous (Bertrand, Hortefeux, Besson, Fillon, Darcos, Devedjian, Alliot-Marie… ), un groupe de sarko-trafiquants qui vit et prospère grâce à au sarko. Or, si j’en connaissais l’existence par ouï-dire, je n’avais encore jamais rencontré une personne qui en soit atteinte. Ou en tout cas, une personne qui ose avouer qu’elle était accro au sarko.
Gérard, simple consommateur de sarko, est donc la première personne que je connais à avoir eu le courage de franchir le pas.

Encore sous le choc, j’ai voulu en discuter avec Georges, qui est un ami et aussi le patron de notre bistrot. Georges a un cœur d’or, et en même temps il est très carré, très entier, et parfois il ne fait pas dans la dentelle. Je n’étais pas sûr que sur ce coup- là il serait de bon conseil, mais malgré tout, j’avais besoin de me confier à quelqu’un, et il était là.

L’air de rien, je lui dis d’une façon abrupte, sans prendre de gants :

- Tu sais Georges, je viens d’apprendre qu’un de mes copains était atteint de sarkozysme chronique. Qu’est-ce que tu ferais à ma place ?
Il essuyait tranquillement un verre derrière le comptoir, et de saisissement il laissa choir le verre qui se brisa sur le sol. Bouche bée, il ne fit pas un geste pour ramasser les morceaux.

- Putain Jacques, ne me dis pas ça ! Pas toi !

Je baissai la tête, légèrement honteux.

- Si, c’est pourtant vrai.

- Mais comment peux-tu avoir un copain accro au sarko, Jacques ? Tu sais que le sarko est une drogue dure ?

Si tu me disais que tu avais un copain serial-killer, par exemple, ça je pourrais le comprendre. Surtout si le serial-killer en question a eu une enfance difficile. Par exemple une maman qui aurait ajouté du calva dans le lait de ses biberons sous le prétexte fallacieux que les bébés imbibés de calva ont un sommeil plus calme. Ou encore un papa qui l’aurait fourgué à l’âge de cinq ans à un réseau de prostitution enfantine pour s’acheter ses doses d’héroïne le soir au fond d’une impasse sombre. Jacques, tu le sais, le serial-killer, même s’il semble parfois un tantinet antipathique, peut tout de même avoir ses cohérences et ses justifications.

Si tu m’avais dit qu’un de tes copains est pédophile, là encore, j’aurais relativisé. Après tout, il y a des évêques très bien considérés qui l’ont été, et d’ailleurs tu sais ce qu’on dit : un pédophile ne peut pas être complètement mauvais , on est déjà assuré qu’il aime les enfants.

J’aurais eu plus de réticence si tu m’avais dit avoir un copain président de France Telecom. Mais comme j’ai l’esprit ouvert, je pourrais encore l’admettre ! Après tout, une vague record de suicides parmi les employés, suicides liés à des conditions de travail totalement ignobles, peut permettre, si on élargit les méthodes de France Télécom à l’ensemble des entreprises, d’atteindre dans celles-ci un taux de 60 % de décès et de sauver ainsi le système de retraites par répartition. A condition toutefois, que les salariés attendent d’avoir fêté leur cinquantième anniversaire pour se jeter par la fenêtre, ce qui leur permettrait d’avoir cotisé suffisamment longtemps pour que leur geste soit socialement utile.

Tout ça donc, j’aurais pu le comprendre.

Mais avoir un copain accro au sarko! Là franchement Jacques, tu me sidères.

Je comprenais bien le discours de George, mais en même temps j’avais besoin d’un soutien compréhensif et de conseils, pas d’une leçon de morale. J’ai préféré couper court à la discussion.

En sortant de l’Univers, j’allumai mon portable, et composai le numéro du docteur Jean Michel, le spécialiste bien connu du sarkozysme chronique, qui est également un pote avec qui je fais quelques virées à vélo, les après-midi où l’Univers est fermé. Je luis exposai le cas de Gérard en quelques mots.

- D’abord Jacques, il faut distinguer le sarkozysme aigü du sarkozysme chronique. Le premier n’est pas forcément dramatique. Il se produit souvent dans un moment d’exaltation, au cours d’une soirée d’élection passée devant la télé avec un groupe d’amis. Généralement c’est plutôt au second tour. Les études montrent que les sujets sont plus sévèrement atteints quand ils regardent TF1, mais il y a une controverse scientifique sur ce point : le fait que ce soit TF1 est-il une cause ou une conséquence de la crise des sujets ? Sans doute les deux s’entretiennent-ils mutuellement, mais quoi qu’il en soit, les effets du sarkozysme aigü passent très vite, le lendemain tout redevient normal. Une seule soirée ne crée pas l’accoutumance.

En revanche, il faut que tu saches que l’accoutumance au sarko n’est pas une maladie. Il s’agit d’une addiction classique, pour laquelle il n’y a aucun remède. Certains s’en sortent, d’autres non, tout dépend des sujets. Ceux qui ont la volonté de s’en sortir et un entourage qui les soutient y parviennent souvent. D’autres assument totalement et en sont même fiers, pour ceux-là, c’est sans espoir.

- Quels sont les dangers pour le sujet, Jean ?

- Ils sont de deux ordres. Tout d’abord, le sarkozysme chronique peut susciter une souffrance psychique intolérable lorsque le sujet est en état de manque. Il lui faut la dose quotidienne de sarko, sinon les crises peuvent être redoutables.

Ensuite, à haute dose, le sarko peut avoir des répercussions sérieuses sur le fonctionnement du cerveau. Mais pour ton copain Gérard , je tiens à te rassurer : il n’y a rien d’irréversible. En cas de sevrage définitif, au bout de quelques semaines les effets négatifs disparaissent.

- Comment se manifestent les effets sur le cerveau ?

- Tout d’abord une déformation de la réalité du monde sensible. Le sujet devient d’un individualisme exacerbé. Il estime que chacun est le seul et unique responsable de sa situation et que la société ne doit surtout pas intervenir pour aider les plus fragiles, les plus démunis.

Il en vient à parfois à prononcer des phrases du genre : « si tu es dans la merde, ne t’en prends qu’à toi, personne ne viendra t’aider ».

Ou bien « il faut arrêter avec l’assistanat, les gens ne foutent plus rien, ils se laissent vivre ».

Ou encore : « c’est la faute aux immigrés si les comptes sociaux de la France sont en déficit, il faudrait tous les foutre dehors ! »

Sous l’effet du sarko, ils se prend systématiquement pour un battant, un winner comme ils aiment à le dire dans le jargon sarkosyste. Et cela, même s’ils en bavent dans la vie de tous les jours et s’ils sont des laissés pour compte de la société.

La deuxième conséquence est moins grave : ils n’entendent plus les arguments. Mais c’est un symptôme qu’on peut trouver aussi ailleurs que dans le sakozysme chronique et qui n’a rien de bien dramatique. On peut vivre avec …

Je remerciai Jean qui me fit promettre de le tenir au courant de l’évolution de Gérard.

En fait, j’avais commencé à percevoir les tous premiers symptômes de sarkozysme chronique chez Gérard deux jours plus tôt.

C’était mardi matin, le jour du marché. Cela faisait à peine deux heures que nous étions attablés devant nos verres de whisky, quand tout à coup, Gérard a prononcé une phrase qui m’a mis la puce à l’oreille :

- Jacques, je te le dis comme je le pense, les 35 heures, et bien c’est une vraie catastrophe pour notre pays.

J’éprouvai un certain malaise et je le regardai attentivement pour voir s’il allait bien. Tout me sembla normal. Je mis ça sur le compte d’une fièvre passagère, fugace, peut-être liée au printemps qui s’annonçait, et je n’y prêtai plus attention.

Le lendemain, nouvelle alerte beaucoup plus inquiétante :

- Tu sais Jacques, plus j’y réfléchis, plus je me dis que pour améliorer mon pouvoir d’achat, je dois faire davantage d’heures supplémentaires, c’est le seul moyen : travailler plus pour gagner plus.

Cette fois, un frisson parcourut ma colonne vertébrale, le doute s’instilla en moi, les pensées se bousculèrent dans ma tête : se pouvait-il que Gérard soit atteint de sarkozysme chronique, qu’il se shoote au sarko ? Les symptômes semblaient bien identiques à ceux décrits dans les revues. Comment avais-je pu passer à côté alors que j’étais son meilleur copain ? Et Yvette, sa femme, se doutait-elle de quelque chose ? Tentait-elle de cacher la gravité de son cas à sa famille, à ses amis ?

Intuitivement, je compris qu’il valait mieux ne pas le prendre de front. Je savais par ouïe dire que c’était le meilleur moyen de braquer, parfois irrémédiablement, la personne atteinte de sarkozysme chronique. Je décidai d’y aller en douceur.

- Hummm, Gérard, de quelles heures supplémentaires tu me parles ? ça fait 14 mois que tu es au chômage, avant de travailler plus, il faudrait peut-être déjà que tu puisses trouver du boulot, travailler normalement, faire 35 heures par semaine, quoi. J’ai l’impression que tu ne vas pas bien, allez, dis-moi ce qui se passe franchement, entre copains, on peut tout se dire !

Son visage, si expressif d’habitude, se figea. Il comprit que j’avais tout deviné. Après avoir avalé une gorgée, il eut un sourire las :

- Oui je sais Jacques, je déconne, mais que veux-tu, c’est plus fort que moi, je ne peux pas m’en empêcher.

Je le saisis affectueusement par l’épaule pour lui manifester mon soutien.

- Ne me dis rien, j’ai compris. Dis-moi, ça fait longtemps que ça a commencé ? C’est incroyable ! Tu sais que je n’avais rien remarqué jusqu’à présent ?

- Qu’est-ce que tu crois, que je suis fier de moi ? Que je vais le crier sur les toits ? Non, j’ai conscience de mon état, je sais que je me détruis peu à peu, que je risque de détruire ma famille. Mais en même temps, c’est tellement bon !

- Oui, j’imagine que ça doit avoir de sacrés effets positifs, procurer des sensations très fortes, sinon tu n’aurais pas continué à t’enfoncer ainsi.

- Jacques, ce que je vais te dire, je ne l’ai encore jamais dit à personne. J’ai touché le fond vendredi dernier, là j’ai compris que j’aurais du mal à m’en sortir. Pendant la journée, je n’avais pas pu avoir ma dose quotidienne de sarko, ni à la radio ni à la télé. Je me sentais fébrile, agité, nerveux. Le soir, j’ai fait croire à Yvette que j’allais passer la soirée à l’Univers avec les copains. Bien sûr je ne pouvais pas lui dire la vérité, elle n’aurait pas compris. Elle a été rassurée, mais en réalité, je suis allé à Nîmes écouter Xavier Bertrand qui venait pour les régionales.

- Merde ? Xavier Bertrand ! C’est terrible !

- Je ne te le fais pas dire. Tu vois où j’en suis ? On ne peut pas dire que Xavier Bertrand ce soit un grand cru du sarkozysme ! Mais pourtant même ça, même du sarko légèrement frelaté, affadi, sans saveur, j’en éprouvai un besoin impérieux !

Quand je suis arrivé en retard à Nîmes, Xavier était déjà en train de parler.

« Mes amis, vous savez bien tout ce que ce gouvernement a fait pour vous : rien que cette année, nous prévoyons la suppression de 35000 postes de fonctionnaires dans les services public, alors que nous en avons déjà supprimé 65500 depuis 2007. Qui peut se vanter d’avoir fait aussi bien que nous ? Depuis l’élection de Nicolas Sarkozy, vous l’avez constaté, la France respire. Tous les services publics vont incontestablement beaucoup mieux, l’éducation nationale, qui se porte à merveille, mais aussi la police, la justice, la santé. L’insécurité contre les personnes recule… ».

A mesure que les paroles de Xavier s’infiltraient dans mon cerveau, je sentais un bien être profond m’envahir, une sorte de félicité, de béatitude. J’étais heureux, me sentais en pleine forme, l’avenir était positif, lumineux et même radieux.

Bien sûr, au fond de moi je savais que ce n’était qu’une illusion dont l’effet serait bien vite dissipé, que la terne réalité me rattraperait trop rapidement, je comprenais qu’il me faudrait entendre d’autres discours si je voulais rester dans le même état d’euphorie. Mais sur le moment, qu’est-ce que c’était bon ! Jacques, si tu n’as jamais connu ça, tu ne peux pas comprendre…

- Et tu n’as pas essayé de résister, de lutter contre l’addiction ?

- Si, j’ai essayé le Villepin, pour tenter une désaccoutumance en douceur, mais ça n’a pas marché, l’effet n’est pas le même, c’est moins puissant, moins euphorisant. Un peu comme si, au lieu de boire du whisky, on prenait du martini, tu vois le genre ?

Je comprenais bien ce que Gérard voulait dire. Du martini ! J’eus un frisson d’horreur.

Gérard paraissait désemparé, à la limite du désespoir, sa main tremblait en tenant le verre, je ne l’avais encore jamais vu comme ça.

Il fit signe à Georges de le resservir et poursuivit sa confession.

- Pourtant, je t’assure, je veux m’en sortir. Tous les jours je me dis : Gérard, il faut réagir, pense à ta famille, à tes amis, tu ne peux pas rester sous l’emprise du sarko toute ta vie ! Mais rien à faire, je tiens 24 heures, et puis c’est la rechute, toutes mes bonnes résolutions s’écroulent comme un château de cartes.

Il eut un rictus désespéré, ses yeux étaient embués de larmes, il ajouta quelques mots avec des sanglots dans la voix.

- Je suis allé encore plus loin que ça, c’est dur à avouer, mais il m’arrive parfois de trouver que Sarkozy est quelqu’un de gentil, et même de très gentil.

- Gentil ? Un type qui veut pendre vivants ses adversaires politiques à un croc de boucher, en veillant à ce que le crochet passe par la gorge et ressorte par la bouche ? Tu déconnes, là ! Gérard, tu te rends compte de l’état dans lequel tu es arrivé ?

Il essuya une larme.

- Je sais, c’est terrible, je crois qu’il faudrait que je me fasse aider. Tout seul je ne m’en sortirai jamais.

Au moment où nous allions sortir, Georges me fit un signe discret de la main. Je m’approchai du comptoir.

-Dis-moi Jacques, ce copain sous l’emprise du sarko dont tu me parlais, ça serait pas Gérard par hasard ?

- Si, en effet, comment tu as deviné ?

- Peu importe, oublie ce que j’ai pu te dire la dernière fois sur le sarkoysme chronique, c’était sous le coup de la colère. Ecoute, tu es son meilleur pote, tu ne peux pas le laisser comme ça, il faut absolument que tu l’aides. J’ai une adresse pour lui. Je croyais que je n’aurais jamais à m’en servir, mais tu vois, tout arrive !

Il sortit un papier au format A5, aux couleurs vives et gaies. Tout en haut, le sigle A.S.A. était imprimé en grosses lettres bleues.

Au-dessous, le nom de l’association s’affichait fièrement : Anciens Sarkozystes Anonymes. Une réunion était prévue le lundi . Je décidai d’y accompagner Gérard.

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Commentaires
P
Dommage ! La plume est habile... mais l'encre gâche tout. Votre propos sur la pédophilie me choque. On ne peut pas rire de tout. Vous avez allègrement dépassé les limites. Ce sera sans moi.
La Sarkolique
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